Tel un rituel. Des hommes, de blanc vêtus, invoquent leur Seigneur, un soir de déroute. Saisie, une femme interroge. Dans l’ombre, une voix lui répond : « Ils enterrent leurs morts. C’est tout ce qui leur reste dans un monde, où l’on se gave de pop-corn pour survivre au déluge ».
Huit interprètes, une galerie de personnages, tous aussi incroyables, les uns que les autres, pour un plateau déjanté. Un conteur des Amériques devisant sur la geste du passé, un poisson causant de la tragédie des hommes, un fou jouant aux zbazo, un accordéon faisant pleuvoir des pétales roses, un monologue pour un fauteuil, du popcorn en cage à prix douteux, une histoire de lapin des premiers jours, des chants sou s sublimes… Un récit en spirale, qui replace les Comores dans un spectre plus large, et des obsessions en pagaille, sur le prolongement du ventre colonial.
Ce spectacle naît d’un besoin de questionner la fabrique coloniale, hors des mémoires dites exclusives, avec la volonté de renouer avec une histoire en partage, de s’affranchir d’un récit mutilé et de s’ouvrir à une pluralité des regards à la fois. Soeuf Elbadawi convie les Comores, la France, le Québec et la Caraïbe sur le plateau, pour murmurer un autre avenir au monde, ensemble.
Obsession(s) est un objet pluridisciplinaire, qui s’échappe d’une prison à ciel ouvert, les Comores, pour retrouver les chemins du monde, et « pour dire la complexité de nos vis-à-vis, entre Sud et Nord, encore sous tutelle », confie son auteur.
Texte et mise en scène : Soeuf Elbadawi*. Distribution : avec Leïla Gaudin, André Dédé Duguet, Francis Monty, Soeuf Elbadawi, Philippe Richard, et l’ensemble soufi des Lyaman (Mourchid Abdillah, Mohamed Saïd, Chadhouli Mohamed). Scénographie : Margot Clavières, Julie Vallée Léger. Costumes : Margot Clavières. Lumière et régie générale : Mathieu Bassahon. Assistanat à la mise en scène : Erell Caouren. Vidéo, recherche et archives : Charlotte Michel. Conception théâtre d’objets et manipulation : Francis Monty en complicité avec la scénographe Julie Vallée-Léger (et Chann Delisle pour la fabrication). Avec le soutien de l’équipe technique du Théâtre Antoine Vitez. Photo : © G. Bastide (BillKiss*/Washko Ink.).
* co écriture des fragments Conte karib et Assassins d’aube en complicité avec André Dédé Duguet, du fragment de La conquête en complicités et improvisations avec Francis Monty et Pierre Porcheron.
** participation de Ankili Houssamoudine, Tadjiddine Ilhane, Toiha Bouhari et Djamil Ali.